"J'ai quelquefois eu l'étrange sensation d'être divisé en deux, l'austère intellectuel moderniste d'un côté, le compositeur accessible et populaire de l'autre". Aaron Copland
Le compositeur et chef d'orchestre Aaron Copland est né à New-York en 1900 . Tout comme Gershwin (né deux ans plus tôt), il est issu d'une famille modeste d'immigrés juifs de Russie.
En 1921, il vient à Paris pour travailler avec le pianiste Ricardo Viñes. Copland rencontre Nadia Boulanger et , comme de nombreux compositeurs américains à sa suite, il va suivre son enseignement au Conservatoire américain de Fontainebleau. Elle va notamment l'initier à Ravel, Stravinsky et aux musiciens du Groupe des Six. Cette rencontre sera déterminante dans son engagement de compositeur.
Nadia Boulanger (1887-1979) en compagnie d'Igor Stravinsky et Darius Milhaud
De retour aux USA, Copland développe principalement un style néo-classique imprégné d'éléments de folklore américain et sud-américain. La musique est lyrique, et reprend des hymnes et des chansons populaires. Copland se fait connaitre avec deux œuvres fortement inspirées par le jazz, Music for the Theater (1925) et le Concerto pour piano (1926). Puis il établit sa renommée au travers de ballets racontant l'histoire pionnière de l'Ouest américain, dont Billy the kid, une suite orchestrale tirée de The Ballet Caravan (1938), le ballet Rodeo (1942) et surtout Appalachian Spring (1944), écrit pour la compagnie de danse Martha Graham.
El Salon México (1936) est une fantaisie orchestrale, utilisant un pot-pourri d'airs et danses populaires mexicaines.
Aaron Copland (1900-1990)
Copland a aussi manifesté un grand intérêt pour le sérialisme, qu'il a décrit lui-même comme "un nouveau moyen de déplacer les sons qui avait, pour un compositeur, un effet régénérant sur son approche et sa technique". En 1949, bien après les Variations pour piano (1930) et la Short symphony (1934) qui utilisent déjà ce langage, Copland part à Paris. Il compte bien y "débusquer quelques dodécaphonistes". Et c'est Pierre Boulez qu'il va débusquer. Par la suite, le sérialisme va s'imposer dans ses compositions , avec notamment Connotations (1962) et Inscape (1967). Cette dernière fut créée par Leonard Bernstein (à la tête de l'Orchestre Philharmonique de New-York) lors du premier concert télévisé de l'histoire.
Copland a aussi écrit pour le cinéma. En 1949, il a obtenu l'Oscar de la meilleure musique de film pour L'Héritière de William Wyler. On lui doit notamment les musiques de Des souris et des hommes et du Poney rouge de Lewis Milestone, ou encore Au bout de la nuit de Jack Garfein.
Du fait de ses convictions politiques, il fut victime du maccarthysme, son nom rejoignant ceux de Charlie Chaplin, Marlène Dietrich ou encore Orson Welles sur la liste noire du cinéma.
Concerto pour clarinette de Copland
clarinette: Benny Goodman
direction: Aaron Copland
Le concerto pour clarinette et orchestre à cordes (avec harpe et piano), a été composé entre 1947 et 1949. Benny Goodman avait passé commande d'un concerto à Aaron Copland, tout en lui laissant une entière liberté dans l'écriture. La seule demande particulière fut une exclusivité de deux ans, dont Goodman ne profita guère puisque la création n'eut lieu qu'en 1950, à la radio, avec l'orchestre de la NBC sous la direction de Fritz Reiner. Quelques semaines plus tard, l'œuvre fut jouée en public par Ralph McLane avec le Philadelphia Orchestra sous la direction d'Eugene Ormandy. La partition avait été remaniée à la demande de Benny Goodman pour simplification (on peut entendre la première version dans l'enregistrement de Charles Neidich chez Chandos).
Le concerto est en deux mouvements, lent/rapide, reliés par une longue cadence virtuose.
Le premier mouvement , très lyrique, sonne avec ce "bittersweet" (doux-amer) caractéristique de Copland.
Dans son final, le concerto emprunte au jazz certains de ses éléments caractéristiques (accentuations, slap de la contrebasse, glissando final).
"with humour, relaxed" avec une contrebasse en slap
Copland utilise un motif sud américain préalablement exposé dans la cadence. Il semble qu'il l'ait entendu pendant son séjour à Rio de Janeiro en 1947 :
Le final est ludique et plein d'esprit. L'écriture rythmique devient parfois complexe, faisant entendre par exemple du 5/8 dans du 3/4 :
Certains passages ne sont pas sans rappeler l'esprit des cartoons hollywoodiens de Tex Avery :
Voici pour terminer un petit lexique (non exhaustif) des notations anglaises peu courantes que vous trouverez dans le concerto:
plainly: simple et clair, sans détours
perky: guilleret
trifle faster: légèrement plus vite
Grand et spectaculaire glissando final!
Le concerto pour clarinette de Copland est publié aux éditions Boosey & Hawkes
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