dimanche 28 novembre 2010

Buenos Aires, Argentina

La tournée en Argentine a été l'occasion de découvrir un peu de ce pays fascinant.
Un des concerts a eu lieu Villa Ocampo.

Villa Ocampo, détail de la façade.

Voici la description qu'en fait son directeur, Nicolas Helft:

"Villa Ocampo est la demeure historique de Victoria Ocampo, à San Isidro, à la périphérie de Buenos Aires."

Villa Ocampo

"Construite en 1891 sur une rive escarpée du Rio de la Plata, dans un site privilégié, elle fut le refuge d'innombrables intellectuels venus des quatre coins du monde, le lieu de rencontre de quelques-uns des esprits les plus remarquables du 20è siècle: Tagore, Stravinsky, Le Corbusier, Malraux, Ortega y Gasset, Camus, Gabriela Mistral et bien d'autres."


Victoria Ocampo (1890-1979) avec Igor Stravinsky

"Roger Caillois, qui vécut pendant plusieurs années en Argentine, y publia, avec le financement de Victoria, Lettres françaises, une revue ouverte aux écrivains de la France Libre. Ce furent des années d'intenses échanges culturels entre la France et l'Argentine, comme un prolongement particulièrement spectaculaire aux relations si étroites que l'Argentine a toujours entretenues avec la France."

Villa Ocampo, détail.

"La Villa Ocampo accueillit aussi les intellectuels argentins les plus prestigieux, qui fondèrent notamment la revue Sur, dans laquelle Jorge Luis Borges, un des habitués de la maison, publia ses principales fictions."


Villa Ocampo, détail du jardin.

Les Habitants de Buenos Aires sont appelés les « porteños », littéralement les "habitants du port".

La Boca
est un quartier pittoresque aux baraques colorées, l'endroit où la rivière Riachuelo débouche dans le Rio de la Plata et où ont débarqué les émigrants italiens.

Caminito

Caminito
Sentier, que le temps a effacé,
qu'entrelacés un jour
tu nous a vu passer, je suis ici,
une dernière fois
pour te conter mon malheur

(paroles de Peñoloza, d'un tango de Filiberto)

La Boca

Non loin se trouve San Telmo, le quartier le plus ancien de Buenos Aires, avec ses bâtisses coloniales, ses rues pavées et ses églises anciennes.

Un endroit où on joue et on danse le tango dans la rue.


El Afronte, Orquesta Tipica

"Les tangueros ne sourient jamais, ils arborent presque en permanence un air grave, un peu comme s'ils dansaient avec leur destin et craignaient de lui marcher sur les pieds", Vassilis Alexakis (Le premier mot)

"Le tango, une pensée triste qui se danse" (Discépolo).

dimanche 21 novembre 2010

Il vient d'arriver; il est nouveau.

(et contrairement au Beaujolais, il ne donne pas mal à la tête)

Disque Guastavino, chez Transart Live (TR164)


L'Argentine a vu naître dans la seconde décennie du XXème siècle 3 artistes qui illustrent les tendances les plus divergentes de la musique de leur pays : Astor Piazzolla a trouvé dans le modèle du tango urbain la source de son inépuisable inspiration. Alberto Ginastera s'est délibérément inscrit dans le courant moderniste de son époque tout en puisant les éléments de son langage dans la musique populaire argentine.


Quant à Carlos Guastavino, il a su traduire avec des moyens d'expression hérités de l'époque romantique les sentiments de la population paysanne, les «gauchos». En touchant le cœur des humbles, il a conquis ses lettres de noblesse, et demeure l'un des musiciens classiques les plus aimés en Argentine. Sa production pianistique s'échelonne de 1945 à 1975, tout comme les deux cents chansons qui lui ont valu le surnom de "Schubert argentin". Doué du génie de la mélodie, Carlos Guastavino a façonné son style en incorporant à son art du chant les tournures vocales venues des usages musicaux traditionnels.


Aux côtés des pièces originales (Tonada y Cueca; Sonate pour clarinette et piano), j'ai adapté pour la clarinette quelques unes des plus belles chansons du maestro argentin (dont El sampedrino et Rosita Iglesias).

De magnifiques pièces pour piano solo, comme Bailecito, complètent ce programme original.

A découvrir!

mercredi 17 novembre 2010

Beautés de sites...

Si vous aimez les clarinettes anciennes:


...les clarinettes piccolo à plateau (ou les clarinettes piccoli aplaties):


...les clarinettes contra-alto dites "contrebasses en mi b":


...les clarinettes allemandes à trous dédoublés:

...les clarinettes françaises à anneaux et trous de ventilation:


...les mongols qui jouent des clarinettes tordues avec le pavillon sous le coude et des chemises à dragons:


ou les taragots roumains pour gaucher:


et bien rendez-vous d'urgence au chtiot musée des Clariboles et Cie:
http://clariboles-et-cie.blogspot.com/

lundi 8 novembre 2010

Francis Poulenc, sonate pour clarinette et piano.

Poulenc et Cocteau
Toute sa vie, Poulenc a manifesté une prédilection pour les instruments à vent. Dans une lettre adressée  en 1923 à son professeur de composition Charles Koechlin, il avouait même que la clarinette était son "instrument chéri".
Francis Poulenc (1899-1963) a écrit la sonate pour clarinette et piano en 1962. Elle est dédiée "à la mémoire d'Arthur Honegger" et fut créée par Benny Goodman et Leonard Bernstein, au Carnegie Hall à New York, le 10 avril 1963. C'était trois mois après la mort du compositeur.

Poulenc par Cocteau
La création française a été assurée par deux grands artistes: André Boutard à la clarinette et Jacques Février au piano. C'était le 20 juillet 1963, au Festival de musique d'Aix-en-Provence.

Jacques Février (1900-1979) fut l'élève de Marguerite Long au Conservatoire de Paris (1er Prix en 1921). Grand interprète de la musique de Francis Poulenc, il créa en 1932 ,avec le compositeur, le concerto pour 2 pianos. Sa discographie est principalement consacrée à la musique française. En 1963, il a reçu le Grand Prix du Disque de l'Académie Charles-Cros pour son enregistrement consacré à Ravel.

Jacques Février et Maurice Ravel
André Boutard (1924-1998) a étudié la clarinette à Toulouse avec Louis Cahuzac puis au Conservatoire de Paris dans la classe d'Auguste Périer (1er Prix en 1944).
Il fut clarinette solo de l'Orchestre de la Société des Concerts aux côtés de Henri Druart (de 1948 à 1967), clarinette solo de l'Orchestre de l'Opéra Comique (de 1949 à 1972), puis de l'Orchestre de l'Opéra de Paris (de 1973 à 1984).

Malgré les gratouillis d'un 33 tours bien usé, on perçoit parfaitement la qualité de son jeu et son tempérament musical dans cet enregistrement réalisé en 1964 (Le Chant du Monde):




La partition est éditée chez Chester Music. L'édition présente certaines fautes (bien connues des clarinettistes français) comme en témoigne cet enregistrement de référence.

Voici celles qui concernent l'Allegro tristamente:

1 mesure avant "2": jouer un mi
4 mesures après "2": jouer un mi
4 mesures après "3": jouer un do #



Petite facétie de Poulenc: le mouvement porte l'indication "allegretto" avec un tempo très rapide (noire à 136). Le titre Allegro tristamente doit donc être compris dans son sens littéral, et être joué gai tristement, ou tristement gai. Voilà qui donnera du sens à l'interprétation de ce mouvement et qui sied si bien à Poulenc, qui se décrivait lui-même comme oscillant entre "gravité et fantaisie".





"J'achève le lamento d'une sonate pour clarinette et piano dédiée à la mémoire d'Arthur. Je crois que c'est très touchant". Poulenc, à Rocamadour, le 3 juillet 1959.

Dans le deuxième mouvement, Romanza, on peut noter que Jacques Février joue bien l'accord mineur à la fin de la 3è avant "6":



Notez cette respiration après le chiffre "2" et transmise par Boutard, avec la consigne de terminer la phrase dans le même souffle :





Dans l'allegro con fuoco, il y a une correction 1 mesure avant "4": la deuxième croche est un fa bémol:

Ajoutez le sforzando à la 10ème mesure de "11":


Ainsi que les accents, 4ème et 5ème mesure après "13":

 

Voici le "Domine Deus, Agnus Dei" du Gloria de Poulenc, composé  en 1959. Vous reconnaitrez aisément le matériau thématique et harmonique proche de celui utilisé dans la sonate pour clarinette:




mercredi 3 novembre 2010

"Si vous étiez paralysé des deux bras, vous peindriez avec le nez". (de Clémenceau à Monet)

Claude Monet, photographié par Nadar en 1901.
Monet ou le parcours d'un audacieux acharné

Né à Paris en 1840, Claude Monet s'est toujours considéré comme "un indiscipliné de naissance".

Hardiesse...
Caricaturiste de talent, il refuse de passer par la voie royale de l'École des Beaux-arts.

scène marine, par Eugène Boudin en 1894.
En 1858, il rencontre Eugène Boudin, peintre surnommé "le roi des ciels", et installe son chevalet en plein air pour peindre "sur le motif" grâce à une invention récente: les tubes de peintures.

La pointe de la Hève à marée basse, 1865, huile sur toile, Kimbell Art Museum.
Exposé au salon de 1865, les critiques saluent "une manière hardie de voir les choses".

Innovation...
Monet excelle à rendre la réverbération de la lumière, les reflets sur l'eau, l'effet de mouvement et de profondeur grâce à une technique "tachiste" innovante, une touche peu précise mais énergique dans des tonalités froides. On le surnommera d'ailleurs le "Raphaël" de l'eau".

La Grenouillère, 1869, huile sur toile, The Metropolitan Museum of Art, New-York.
Indépendance...

Malgré des débuts prometteurs, Claude Monet va être banni du Salon. En 1874, il prend alors la décision de créer une société anonyme, une coopérative d'artistes qui organisent une espèce de Salon "off". C'est là qu'il va présenter son fameux tableau "Impression, soleil levant" qui va déchainer les critiques et l'incompréhension et donnera son nom à l'impressionnisme.

Impression, soleil levant, 1873, huile sur toile, Musée Marmottan Monet, Paris.

Travail acharné...
Dans la Creuse en hiver 1889, alors qu'il peint en extérieur, le froid est si terrible que ses doigts se couvrent d'engelures. Il les enduit de graisse, met des gants et continue de travailler.
Dans les années 1890, Monet se lance dans ce qui sera les premières séries de l'art occidental: un ensemble de toiles représentant le même motif, comme un thème et variations. Parmi les plus célèbres, on trouve les "Cathédrales" de Rouen, qui sont presque 30 variations de la lumière en fonction de l'heure et du temps.


La Cathédrale de Rouen


Obstination...
Dès 1890, Monet s'installe à Giverny où il fait construire un bassin agrémenté de nénuphars et surmonté d'un pont japonais.
Malgré une cataracte qui le rend presque aveugle et modifie sa perception des couleurs, il travaille sans relâche, notamment autour du thème des nymphéas. Ces recherches vont le conduire jusqu'aux portes de l'abstraction.

Les Nymphéas

Monet meurt en 1926. Bien que pris de doutes, il semble qu'il a toujours eu une certaine conscience de son rôle dans l'histoire de l'art. Son talent naturel, son acharnement au travail, son sens de l'observation et son imagination l'ont mené à la modernité.

"Ce que je ferai ici aura au moins le mérite de ne ressembler à personne, parce que ce sera l'impression de ce que j'aurai ressenti, moi tout seul".