lundi 14 décembre 2009

le sens du détail...

Voici une petite réflexion après mon voyage en Chine.


J'ai fait travailler des clarinettistes chinois, notamment au Central Conservatory et au China Conservatory, les deux grandes écoles supérieures de Pékin.

Je me suis essayé à parler quelques mots de chinois: des phrases de politesse, pour le plaisir, et quelques mots utiles, par exemple pour demander de rejouer, de soutenir, etc.


Une des difficultés de la langue chinoise, c'est la maîtrise des 4 tons.
Les 4 tons sont des variations subtiles de l'intonation: le 1er ton est droit et égal, le 2ème est montant, le 3ème est descendant puis remontant et le 4ème est descendant.

Longue Galerie (728 mètres)-Palais d'été

Le même mot, par exemple "tchi", selon le "ton" signifiera "sept" --> , "chevaucher" -->, "lever" --> ou "énergie" -->.

Pour demander à l'élève de "soutenir", il suffit de dire "tchi" 4ème ton (qui veut dire à la fois énergie et souffle).
Mal prononcé, on frôle le malentendu, voire l'incompréhension!



La musique aussi est un langage.
Au-delà des notes et du rythme, il y a aussi de subtils détails qui influencent le discours musical.

Dans cet extrait de la 2ème pièce pour clarinette seule de Stravinsky (Chester Music), voici quelques subtilités à considérer:
- certaines "petites notes" sont "hors" de la liaison tandis que d'autres y sont "incluses".
Faire ou ne pas faire entendre la différence modifie sensiblement le discours musical.
- Stravinsky a pris soin de noter la place des respirations ( et a demandé expressément de s'y tenir).
Faire ce qui est indiqué, c'est respecter la pensée du compositeur et rendre compréhensible la construction et la ponctuation des phrases.
- le "fa" qui précède la respiration a une valeur rythmique précise.
Jouer par négligence la note plus longue (comme je l'entends souvent faire) change la musique.
- il y a un "fa" est avec un point, et un "sol" avec un chevron.
Faire cette différence enrichit votre exécution.

Voici un autre exemple, extrait des "Domaines" de Pierre Boulez (Universal Edition):

Au-delà du choix des nuances (qui constitue une des parts variables de la pièce), ce fragment est une véritable étude sur les modes d'attaque: chevron sous liaison, point, point sous liaison, point sous trait, trait sous liaison, liaison.

A partir du XXème siècle, la notation devient particulièrement précise.
Voici un extrait de la "Première rhapsodie" de Debussy (Peters)

Je vous invite à étudier ces quelques lignes, à l'affût de tous les (nombreux) détails, notamment nuances et articulations. Dans ces quelques mesures, il y a de quoi faire!
Puis votre objectif sera, par la qualité de votre jeu, de "donner à entendre" exactement tout ce qui est écrit.
Et vous verrez comme le raffinement du détail induira le raffinement musical!

Quand quelquefois vous vous sentez démunis musicalement, le simple fait de jouer tous les détails d'une partition est déjà source d'une grande richesse!
Et c'est aussi le meilleur moyen pour ne pas trahir la pensée du compositeur!

On dit souvent que le diable se niche dans les détails...

Regardez bien attentivement cette photo (que j'ai prise sur le portail ouest de Notre-Dame-de-Paris) et qui représente Adam et Ève.
Adam, c'est le barbu. Ève, en bas à droite, croque la pomme, sous le regard d'un bel ange...
Et là, le détail à ne pas manquer...



...c'est la main de l'ange posée sur une branche du pommier... et voilà comment l'ange devient démon!

Et oui, le diable se niche toujours dans les détails!

1 commentaire:

  1. Bonjour Florent,vous être bien?
    Oui,c'est très dure la langue chinoise,même aussi pour les chinoises,la langue et la façon de souffle est très important pour bien prononcer.Maintenant je me trouve que je parle mal la langue chinoise :(
    Bonne soirée et à bientot!!!!

    RépondreSupprimer